Cécile Reims et Fred Deux


  

Cécile REIMS
 
Née en 1927, elle vécut sa petite enfance, dans une bourgade de Lituanie, dans une famille juive traditionnelle. Arrivée en France en 1933, la guerre et le désastre qu’elle entraîna (l’anéantissement des siens) furent déterminants : il fallait donner un sens à cette vie, devenue, un privilège. Peu après la libération, elle s’engagea dans l’armée clandestine juive et gagna – illégalement – la Palestine. Une grave atteinte de tuberculose la contraignit à un retour en France pour s’y soigner. Ce fut aussi un retour à la gravure au burin à laquelle l’avait initiée Joseph Hecht et qu’elle pratiqua avec la même exigence que son Maître.
En 1951, l’improbable rencontre avec Fred Deux, l’a fit bifurquer, l’art devenant, dès lors, le fondement de leur route commune. Avec, cependant pour Cécile, de durables interruptions et des chemins de traverse. Par besoin personnel ou par nécessité. Celle, notamment,  d’assumer le quotidien. Le tissage à la main y répondit pendant des années, tout en comblant un désir créatif persistant.
En 1966, le hasard – ce prodigieux fil conducteur – l’amena à croiser Georges Visat, l’éditeur, entre autres, de Bellmer. Visat était à la recherche d’un buriniste capable de graver des dessins de l’artiste sans trahir leur subtilité et sensibilité.
Après quelques hésitations, ce fut l’occasion, inattendue et surprenante, de revenir à la gravure et de se révéler à elle-même, graveur d’interprétation.
Après la mort en 1975 de Bellmer, Cécile Reims alternera gravures d’interprétation  (Fred Deux – Léonor Fini) et œuvres personnelles : gravures éditées en livres et recueils.
En 2004, la bibliothèque nationale lui consacra une exposition.  

Fred DEUX
 
Né en 1924 dans une famille d’ouvriers de la Banlieue parisienne, Fred Deux travailla très tôt en usine. Les menaces de l’occupant le firent s’intégrer en 1943 à un groupe de résistants, puis à terminer le combat en s’engageant dans le corps des goumiers.
Par un concours de circonstances, il se retrouve employé dans une librairie de Marseille.
Il y découvre les livres et, avec passion, tout ce à quoi la lecture lui donne accès. Celle de B. Cendrars, A. Breton, H. Miller lui ouvrent un horizon inespéré. Puis ce fut la révélation de l’art à travers Paul Klee, en premier lieu, puis des surréalistes.
Le mur qui l’emprisonnait était donc franchissable. Les premiers dessins, taches, écrits, naissent.
Fred Deux quitte Marseille en 1951, approche André Breton, fréquente le groupe surréaliste.
Karl Flinker qui, passant par la librairie, avait remarqué un carton à dessin contenant ces dessins-taches, les expose à la galerie Martin Flinker. Leur vente lui permettra de « tenir » jusqu’à sa rencontre avec Cécile.
Très vite, la maladie les obligea à quitter Paris et à se rapprocher des sanatoria. Commença alors une existence hasardeuse sur laquelle planait l’ombre de la maladie et les difficultés matérielles mais qui, par son isolement, permit à Fred de se consacrer totalement et dans la plus grande liberté intérieure à ce qui était en gestation et qui, petit à petit, vit le jour.
Années difficiles mais exaltantes dans le silence d’un hameau de montagne. Les dessins s’accumulèrent. Des livres furent écrits et publiés : La Gana, La Perruque… Des galeries (A. Chave, Daniel Cordier), le CNAC (ancêtre du Centre Pompidou) exposèrent les œuvres.
Cécile et Fred Deux, prolongèrent le silence de Lacoux en venant vivre au Couzat, un lieu-dit du Berry, puis à la Châtre. Des expositions se succédèrent, des livres aussi.
Désormais, tout en persistant à vivre en retrait, l’œuvre de Fred Deux était connue.
En 2004, le Centre Georges Pompidou lui consacra une exposition.
Fred Deux décède en 2015.

la « collection » de Cécile et Fred DEUX
 
Au fil des ans, le plus souvent par voie d’échange, les œuvres d’autres artistes accompagnèrent leur existence (œuvres sur papier ou gravures de Bellmer, Michaux, Matta, Brauner, Sima…)
Des objets primitifs venus jusqu’à eux, d’un ailleurs inactuel et d’où émanait une singulière force vitale, une puissance artistique, emplirent les pièces de leur maison.
Peu après leur arrivée à la Châtre, Cécile et Fred s’associèrent à l’essor grandissant du Musée de  l’Hospice Saint-Roch, par la donation ou le dépôt de gravures, de dessins, mais aussi de sculptures de Fred Deux, pièces rares que le Musée est le seul à posséder.
Elaborées à partir de matériaux détournés, un assemblage insolite leur confère une réalité nouvelle, empreinte de poésie.
En 2001 Cécile et Fred prirent la décision de faire vivre œuvres et objets au-delà de leur propre vie et de leur seul regard, en leur faisant faire « le grand voyage » de la Châtre jusqu’au Musée de l’Hospice Saint-Roch à Issoudun. Dessins, gravures, objets seront exposés dans un roulement annuel.

Après avoir vécu près de 15 ans dans un village du Haut-Bugey, Fred Deux et Cécile Reims se sont installés, en 1973, dans le Berry, cultivant, ici et là, un écart propice à leur cheminement d’artistes. 

Le musée de l’Hospice Saint-Roch présente régulièrement leur oeuvre respective : de février à mai 2012 l’exposition « Cécile Reims  et les graveurs du XVème au XXIème siècle ».
En 2014, à l’occasion du quatre-vingt-dixième anniversaire de Fred Deux, le musée consacre une année à l’artiste, rythmée en trois expositions successives, présentant le fonds du musée enrichi d’œuvres majeures des collections publiques et privées « Fred Deux, le Dessin à  corps perdu ».